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Obligation de sécurité du salarié

Managers : organiser un team building trop extrême peut finir en licenciement pour faute grave

Organiser un team building pour souder les équipes et inviter les salariés à se surpasser, pourquoi pas, mais il ne faut pas que cela compromette leur santé et leur sécurité. Illustration dans un arrêt du 23 octobre 2019 où les salariés devaient marcher sur du verre brisé.

Des collaborateurs appelés à marcher pieds nus sur du verre brisé

Dans cette affaire, un manager avait organisé pour son équipe de cadres un team building, assuré par un prestataire. Une des épreuves consistait à « casser tour à tour une bouteille en verre enroulée dans une serviette à l’aide d’un marteau, à déposer le verre brisé sur un morceau de tissu étendu au sol et à faire quelques pas sur le verre ainsi brisé pieds nus ».

Seul un collaborateur avait refusé d’y participer, après être « sorti de la salle en larmes » et avoir été « obligé de donner les raisons de son refus devant l’assemblée », à savoir qu’il était porteur d’une pathologie.

Ce collaborateur avait dès le lendemain alerté le médecin du travail et la responsable RH, en faisant part de son mal-être vécu lors de ce team building et de la crainte de représailles de son manager sur son bonus annuel.

Après enquête menée auprès des autres collaborateurs, qui ont révélé « que si l’activité était basée sur le volontariat, certains ont estimé devoir être obligés de participer sous la pression du groupe et qu’il était évident qu’il y avait des risques de coupures », l’employeur a licencié pour faute grave le manager en charge du team building.

Manquement du manager organisateur du team building à son obligation de sécurité

Le manager a saisi les juges estimant que son licenciement n’était pas justifié.

Il estimait qu’il n’avait fait que suivre les instructions de l’employeur en organisant ce team building avec l’aide d’un prestataire référencé par lui. Selon lui, « l’employeur qui exige du salarié qu’il supervise une activité à risque ne peut lui reprocher la réalisation de ce risque dans le cadre de cette activité organisée dans les conditions qu’il a imposées ».

Cet argument ne convainc pas la Cour de cassation qui rappelle que tout salarié est tenu à une obligation de sécurité envers les autres salariés.

Rappelons qu’en vertu de cette obligation, il incombe à chaque salarié de prendre soin, en fonction de sa formation et selon ses possibilités, de sa santé et de sa sécurité ainsi que de celles des autres personnes concernées par ses actes ou ses omissions au travail (c. trav. art. L. 4122-1).

Comme l’ont relevé les juges, au regard de la nature particulière de l’épreuve et en particulier du mal-être exprimé par un collaborateur, le manager aurait dû immédiatement interrompre l’épreuve.

Or, en n’intervenant pas durant l’épreuve pour préserver l’intégrité physique et psychique de ses collaborateurs, le manager a manqué à son obligation de sécurité.

Son licenciement pour faute grave était justifié.

Cass. soc. 23 octobre 2019, n° 18-14260 D

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